Grand Format : Habitat Participatif pour tous, le logement social comme solution

Pour vivre en habitat participatif, l’usage le plus courant est d’être propriétaire que ce soit individuellement ou collectivement. La propriété n’étant pas accessible à tous, cela peut apparaître comme un frein pour l’accès à ce mode d’habiter.

Pour autant, cela ne signifie pas que l’habitat participatif demeure réservé à une frange de la population « ayant les moyens ». Au contraire, les valeurs de partage et de solidarité qu’il porte, amènent les groupes d’habitants à rechercher des solutions favorisant la mixité au sein de leurs habitats.

L’une des solutions possibles pour accueillir tout un chacun quels que soient ses revenus, dans un projet d’habitat participatif, est le logement social.

Des habitats participatifs “sociaux” historiques


Les Naïfs à Meylan

L’idée est loin d’être nouvelle, certains habitats participatifs les plus anciens ont été conçus en locatif social dans les années 80.

En Isère, c’est le cas des Naïfs, à Meylan, dans le quartier des Béalières, ou encore de la Viorne, à Villefontaine, tous deux habitats participatifs de 13 logements construits en 1985 par Pluralis Habitat. Et toujours actuellement occupés par des locataires du bailleur social.
Ailleurs en France, c’est également le cas des Crieurs, à Villeneuve d’Ascq, construit à la même époque par un bailleur local.

Le premier est aujourd’hui encore un habitat participatif, sous statut de logement social, quand le second s’est progressivement transformé en copropriété tout en maintenant le fonctionnement collectif.
Le troisième quant à lui est redevenu du logement social “classique” mais nombre de ses habitants a, par la suite, fondé d’autres habitats participatifs, partout en France.

Ces expériences d’alors ont profité d’un cadre politique et législatif particulier, sur fond de construction de villes nouvelles et d’expérimentations sociales.

Une démarche toujours d’actualité qui multiplie les concrétisations


Aujourd’hui, le contexte est différent mais la volonté est toujours présente. La cartographie d’Habitat Participatif France recense près de 80 projets, en travaux ou installés, intégrant du logement social.

Exemples récents et notables, les Toitmoinous à Villeneuve d’Ascq et Mascobado à Montpellier, sont des habitats participatifs en co-propriété mêlant propriétaires occupants et locataires du bailleur social partenaire.
Dans les deux cas, les habitants se sont regroupés au sein d’une association afin de gérer collectivement les espaces communs et le vivre ensemble.

Mascobado à Montpellier – Crédit photo : F.JOZON

Plus proche de nous, à Crolles, suite à une démarche d’appel à projet portée par la commune et accompagnée par les Habiles, deux projets d’habitat participatif intégrant des logements sociaux sont en passe de se réaliser au sein de l’écoquartier du Parc. Mosaïque, en copropriété et en partenariat avec un bailleur social et Mosaïcoop, une coopérative d’habitants dont le montage prévoit un agrément PLS.

Comment fait-on de l’habitat participatif en logement social ?


Qu’est-ce que le logement social ?

Le logement social accueille aujourd’hui 18% de la population française et 65 à 70% y serait éligible (chiffres-clés du logement social 2020, USH).

L’offre « logement social » se décline suivant deux dispositifs : le logement locatif social et l’accession sociale. Comme son nom l’indique, le premier permet à l’habitant d’être locataire de son logement quand pour le second, il s’agit d’en devenir propriétaire.

Le locatif social

Le principe général du logement locatif social est de loger des personnes en leur garantissant des loyers modérés, sous conditions de revenus.

Trois principaux plafonds sont pratiqués et dépendent des financements mobilisés pour leur construction : le PLS (prêt locatif social), le PLUS (prêt locatif à usage social) et le PLAI (prêt locatif d’aide à l’insertion), qui induisent des niveaux de loyers différents.

Pour le bailleur social, l’opération immobilière est financée à l’aide de prêts dédiés, d’un prix d’accès au foncier encadré et inférieur à celui du marché, de fonds propres et, éventuellement, de subventions des collectivités.
Selon la localisation, les règlements d’urbanisme obligent, pour des constructions dépassant un certain nombre de logements, à réserver un pourcentage de logement pour du locatif social.

L’accès au logement social est strictement encadré et l’attribution des logements se fait au sein de commissions paritaires qui étudient la situation des demandeurs.

Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site Service-public.fr.

L’accession sociale

L’accession sociale, permet à des ménages d’accéder à la propriété de leur logement à des prix réglementés (environ 25% inférieur au prix du marché), sous conditions de revenus.

Le prêt qui finance ces opérations est le PSLA (prêt social location-accession) qui permet à l’acquéreur d’être d’abord locataire sur une période de jouissance avant d’acquérir son logement. À celà s’ajoute des garanties de rachat et de relogement en cas d’accident de la vie.

Et l’habitat participatif dans tout ça ?

Ces dispositifs peuvent être mobilisés pour permettre l’habitat participatif pour tous, notamment dans des projets “mélangeant” ces différents types de financements.

Pour reprendre l’exemple des Toitmoinous, sur les 22 logements, on compte 7 logements locatifs sociaux (1 PLAI et 6 PLUS), 11 logements en accession sociale (PSLA) et 4 logements en accession libre (c’est à dire sans dispositif particulier).

Pour Mascobado, sur 23 logements, il s’agit de 5 logements locatifs sociaux (3 PLAI et 2 PLUS), le reste étant réparti entre accession sociale et libre.

Au delà de la simple énumération des dispositifs utilisés, c’est surtout le partenariat avec un bailleur social convaincu qui permet la concrétisation de ces projets d’habitat participatif.

En s’adaptant au rythme d’un projet d’habitat participatif, en permettant aux habitants de participer à la conception de leurs futurs logements, en s’impliquant dans la recherche de solutions pour financer les espaces communs et souvent, en collaborant avec des professionnels accompagnateurs de projets, ces organismes participent activement au développement d’un habitat participatif pour tous.

Le cas particulier des coopératives d’habitants

Comme évoqué plus haut avec l’exemple de Mosaïcoop, une coopérative d’habitants (selon le modèle Habicoop) peut elle aussi faire appel au Prêt Locatif Social (PLS) pour financer son opération immobilière.

Cela lui permet d’être elle-même « bailleur social » pour ses habitants sous plafond PLS et de leur garantir un loyer encadré. Pour cela, elle doit déposer une demande d’agrément PLS à la Direction Départementale des Territoires de son département.

À noter que les autres financements, PLUS et PLAI, ne peuvent être utilisés par les coopératives d’habitants. Certaines coopératives d’habitants ont néanmoins lié des partenariats avec des bailleurs sociaux pour qu’ils portent la construction de logements qui permettent d’accueillir des habitants dont les ressources sont sous les plafonds PLUS et PLAI.

Et pour vous ?


Si vous êtes concernés par ces dispositifs et que vous souhaitez vivre en habitat participatif, si votre groupe-projet cherche des solutions pour définir un montage qui permette à tous de prendre part à l’aventure, sachez que des solutions existent et qu’il est possible de faire appel à un organisme de logement social.

L’association les Habiles travaille activement pour accompagner les habitants et convaincre ces organismes de participer au développement de l’habitat participatif.

Tristan Chabanne – Chargé de promotion de l’habitat participatif